Vendre du miel certifié biologique constitué jusqu’à 49,99% de miel non biologique est-il autorisé ?
La réponse est OUI ! Et cette escroquerie manifeste relève de la réglementation européenne.
Dans le cadre de la rédaction d’un guide de lecture pour l’application en France de la réglementation européenne relative à la certification biologique en apiculture, le Syndicat National d’Apiculture, l’association Terre d’Abeilles et l’Union Nationale de l’Apiculture Française découvrent un règlement intolérable à l’égard des consommateurs et qui menace l’apiculture.
Les trois organisations ont interpellé l’INAO et la DGPE pour exprimer leurs très vives préoccupations en matière de déontologie, vis-à-vis aussi de la filière biologique.
Nous avons fait part de notre profonde indignation concernant l’absence de rigueur des critères en vigueur appliqués aux aires de production et à la qualité biologique des zones de butinage éligibles à la certification, qui autorise à certifier biologique un produit de la ruche qui ne diffère pas d’un produit conventionnel… Une imposture tant pour les apiculteurs conventionnels que pour les apiculteurs biologiques qui ont à cœur de respecter leur clientèle !
Nous refusons le terme « essentiellement », en l’occurrence, utilisé au point 1.9.6.5. de l’Annexe II du Règlement (UE) 2018/848 du Parlement européen, relatif aux « Logement et pratiques d’élevage ». En raison de son imprécision, ce terme offre aux États membres toute liberté d’interprétation… Ainsi, en France, le guide de lecture autorise à certifier biologiques des produits de la ruche issus d’aires de butinage pouvant être composées jusqu’à 49,99% de floraison(s) non conformes ! Ce qui s’avère une tromperie délibérée à l’égard du consommateur.
Une liberté d’interprétation susceptible de s’appliquer aussi au plan temporel, suggérant que des ruches présentes jusqu’à 49,99% du temps sur des zones non conformes seraient pareillement éligibles à la certification biologique !
Serait-il légalement admissible de certifier biologiques :
- Une salade de tomates composée de 50,01% de tomates certifiées biologiques et de 49,99% de tomates dites « conventionnelles » ?
- Du lait produit par des vaches présentes 49,99% du temps sur des pâturages non conformes ?
La question se pose !
Le SNA, Terre d’Abeilles et l’UNAF s’insurgent contre cette réglementation en vigueur qui autorise la vente de miel certifié biologique alors que son mode de production ne l’est pas et alertent face au risque qu’elle présente de concurrence déloyale entre les modes de production apicole biologique et conventionnel, décrédibilisant tout à la fois la certification biologique et l’apiculture française.
Les scandales agro-alimentaires suscitent chez les consommateurs une défiance qui les rend plus exigeants et plus vigilants… y compris vis-à-vis de la certification biologique. C’est pourquoi, comme les autres produits alimentaires qui bénéficient de cette certification, les produits de la ruche - miel, pollen gelée royale, propolis, doivent être soumis à des exigences fiables, claires, transparentes et vérifiables, tant pour le producteur que pour le certificateur et le consommateur.
Dans un souci déontologique et de transparence, le SNA, Terre d’Abeilles et l’UNAF ont proposé à l’INAO et à la DGPE que des critères rigoureux et sans aucune ambiguïté soient dorénavant appliqués aux aires de production éligibles à la certification biologique du miel et des autres produits de la ruche, afin de garantir aux abeilles des ressources nectarifères et pollinifères de qualité et, aux consommateurs, des produits réellement issus du mode de production biologique. Une liste transmise à l’INAO par courrier du 19 janvier 2022, qu’ils souhaitent voir figurer dans le prochain guide de lecture.
Au cours d’une réunion visio qui s’est tenue ce 16 février entre l’INAO, la DGPE et nos trois organisations, les représentants de l’INAO ont fait part de leur surprise face au laxisme du règlement en vigueur, sans pour autant envisager de le faire évoluer, s’en remettant à l’avis à venir de la Commission européenne.
L’inaction face à cette situation inacceptable consisterait à cautionner l’escroquerie à l’égard des consommateurs. Le SNA, Terre d’Abeilles et l’UNAF s’y opposent et n’envisagent pas d’en rester là. Ils invitent les Françaises et les Français à la plus grande vigilance et à soutenir leurs revendications.
Frank Alétru, président du Syndicat National d'Apiculture
Béatrice Robrolle, présidente de Terre d'Abeilles
Christian Pons, président de l'Union Nationale de l'Apiculture Française